08Mar
C’EST UNE POUSSEE VITALE DU FOND DES TEMPS, UNE ENERGIE CONTAGIEUSE !
C’EST UNE POUSSEE VITALE DU FOND DES TEMPS, UNE ENERGIE CONTAGIEUSE !
Ce samedi 29 février 2020 au Théâtre de la Reine Clothilde à Paris, Emile AZZI invitait à la PREMIERE représentation de la pièce de théâtre Bérénice qu’il a scénographiée et mis en scène pour nous permettre d’être co-acteur, dans un tourbillon de passions , et d’apprécier le texte de cette tragédie qui questionne le monde de Racine au XVII° siècle, grâce à la grande énergie contagieuse et la force de la parole des comédiens de sa compagnie . Ce fut une surprise divine !
Cette tragédie écrite, en cinq actes en vers, par Jean Racine en 1670, est réputée pour la beauté de son texte et la délicatesse des sentiments qui y sont exposés. Il s’agit de l’histoire de l’amour contrarié entre l’empereur romain Titus et Bérénice la reine de Judée.
L’intrigue de Bérénice s’organise autour de trois personnages : Titus, qui vient de succéder à son père Vespasien comme empereur de Rome, la reine Bérénice et Antiochus le roi de Comagène, ami de Titus et confident des deux amants. Antiochus est secrètement amoureux de Bérénice. Titus et Bérénice s’aiment et projettent de se marier. Mais les Romains sont hostiles à ce mariage (Titus venait de gagner une guerre qui mettait fin à la rébellion des juifs). Aussi Titus renonce à l’amour de Bérénice, princesse étrangère. Faut-il choisir la passion ou le pouvoir ? Tel est le terrible dilemme auquel est confronté Titus tout au long de la pièce, dilemme qui le précipite d’emblée vers une issue tragique connue dès le début. Bérénice pour autant ne se rapproche pas d’Antiochus.
Il nous arrive de porter nos choix sur une pièce de théâtre, à partir de ce que l’on reconnaît dans l’art de création du scénographe qui travaille sur la connivence avec le spectateur, avec l’incarnation des émotions qui frappe de manière fluide, limpide, linéaire. C’est le cas avec Emile Azzi qui a partagé, ses points de vue technique, esthétique, et sa façon spécifique de penser et dramatiser l’espace. Son Théâtre est gardien de la vie !
« Dès le départ de mon intuition, mon instinct, la sensibilité que j’ai éprouvée pour cette pièce m’a été une évidence et le travail avec les comédiens sur le plateau immédiatement a confirmé ma perception. C’est le contexte extérieur qui structure l’espace de ma Bérénice, pour moi il s’agit d’une intuition ancienne. La pièce évoque le cabinet de Titus qui se retrouve au bord d’une mer de glace, comme dans l’expression métaphorique pour l’image de l’environnement avec la glace blanche et froide. Cet emprunt de formulation désigne un comportement imperturbable, sur lequel rien n’a d’emprise. Toute volonté de départ est confrontée à cet élément, symbole de la solitude des héros qui sert de lieu d’introspection potentiel, un monde mythique, un rapport à la mer primordiale. »
La mise en scène est riche de sens symbolique et très épurée, elle marque la dualité présente à travers le temps et l’espace. Il faut imaginer une ligne allant de cour à jardin et une autre reliant l’avant-scène du fond, la croix ainsi formée est l’antichambre de l’empereur et de la reine, un entre-deux, base du déchirement des personnages et de leur dualité propre, ce sont des personnalités publiques en proie à des sentiments personnels.
L’autre répartition du décor accentue la scission, et se compose de quelques colonnes qui cloisonnent les trois espaces pour les trois personnages, selon les deux niveaux de marches d’escaliers, représentant la différence sociale, et la différence de registre pris par chacun des personnages. Il s’y jouera un dualisme amour-haine, dont la grande dominante reste l’abandon. Ici, abandon de Bérénice par Titus, au nom, non de Rome, mais de l’idée que Titus veut s’en faire … et en contre-coup, abandon de Bérénice pour Titus. Bérénice, Portrait du Fayoum ?
Le fond noir qui apparait parfois en fond de scène matérialise l’idée de destin qui s’articule autour de cet enchaînement des causes et des effets conduisant à la nuit, à la mort.
Cette scénographie fait aussi se juxtaposer tous les éléments : les costumes, les bijoux inspirés de la culture de l’origine orientale de Bérénice, la luminosité des matières, couleurs à l’image de l’art roman ou des grandes œuvres des peintres, montrant que les époques, les espaces, les cultures s’entremêlent ? En effet, Il y a métissage de l’espace : la scénographie se déroule dans un univers atemporel, elle croise les temps, la modernité et l’Antiquité. Métissage du son dans les chants et musique orientale. Les extraits musicaux après chaque moment clé soulignent la gravité et la force des sentiments des personnages, alors que le spectateur est témoin impuissant de ce mécanisme tragique qui se déroule inexorablement devant ses yeux.
La traversée des couleurs sur la scène, comme avec le sfumato, pour donner des contours imprécis alors que la passion a une couleur symbolique rendant ainsi plus dense le dialogue entre le verbal et le visuel c’est un artifice fondamental de la poésie, le bleu pour la noblesse, le blanc apporte brillance, élégance majestueuse, elle illumine les autres couleurs, le rouge la couleur de la vie et de la mort, l’amour érotique représentant chaleur et énergie, ou tour à tour colère et audace.
Métissage des postures des corps des protagonistes comédiens : Titus est étudié d’après des sculptures romaines. Strates et sédimentation des époques pour un langage figuratif et narratif, connu à l’âge d’or sous Trajan, le buste droit et le regard portant au loin, il est déchiré entre ses résolutions en faveur de son destin politique, l’amour qu’il ressent véritablement et la souffrance que cette contradiction génère, ce blocage se joue dans son corps. J’explore beaucoup les musées, le Louvre, pour l’art des tableaux qui développent des poses plastiques et les codes culturels.
« J’ai également la volonté de faire en sorte que le texte puisse résonner à un endroit, dans un certain axe, je pense les choses comme des mouvements, les élans des mouvements « justes » s’alignant avec ceux du corps dans l’espace de l’écriture scénique qui va créer une puissance de frappe pour mettre les comédiens en orbite. ». Je travaille beaucoup la démarche des personnages pour Bérénice : une entrée gaie et une sortie montrant sa douleur ; pour Titus, ses pulsions aristocratiques, la douleur, la posture politique ; pour Arsace, la vitalité. Pour Antiochus, c’est un personnage toujours sur le départ, qui ouvre et qui clôt la pièce il retourne dans le noir, dans l’épaisseur du temps, il est aussi concerné par l’oscillation entre la souffrance amoureuse et l’espoir.
Les gestes, chez Racine, sont propres à l’écriture de l’auteur et à l’alexandrin, qui contrebalance le chaos, dans cette triangulation amoureuse Racine en poète de cour, invente et se plaît jusqu’au bout à la rendre absolument inextricable.
La versification est au service du sens, il traduit à merveille le dilemme tragique, les images se répondent les sons également, la syntaxe est mise en relief par le rythme du vers, la répétition anaphorique de « sans que » au vers 1116 « Sans que jamais Titus puisse voir Bérénice » où la césure à l’hémistiche au vers 1500 « Pourquoi suis-je empereur ? Pourquoi suis-je amoureux ? »
Le plaisir de ce spectacle se partage avec les élèves de la classe de français, qui étudient PHEDRE. Et, nous tombons d’accord que Racine nous donne dans Bérénice, une pièce contemporaine que nous aimerons revoir pour mieux la comprendre encore.
POUR ALLER PLUS LOIN ….. THEMES EN JEU
En peinture : Le Roi gouverne par lui-même de Charles Le Brun
http://www.galeriedesglaces-versailles.fr/html/11/collection/c17.html
On aborde ici l’ancrage historique et son impact dramaturgique : La colonisation : la reine étrangère Bérénice a traversé les mers, femme de l’exode, de la Diaspora - et le colonisateur, l’exil, la répudiation. L’action se situe en 79 à Rome, après la destruction du temple de Jérusalem. Le contexte historique est celui d’une répression et d’un massacre effroyables menés par Rome, et notamment par Titus, contre les juifs.
http://www.galeriedesglaces-versailles.fr/html/11/collection/c17.html
www.acielouvertlesjustescauses.fr
La compagnie fondée en 2010 par Emile Azzi voir le portofolio des artistes. Emile Azzi, dans le rôle de Titus – Rabiàa Tlili dans le rôle de Bérénice,
Les Principaux personnages dans la pièce de Bérénice sont :
Emile Azzi rôle TITUS, Rabiaà Tlili rôle BERINICE, Alexandre Triaca rôle d’Antiochus confident des deux amants, et roi de Comagène. Philippe Michel rôle Paulin, Delphine André rôle confidente de Bérinice.
Un Théâtre gardien de la vie écrit son histoire :
https://www.theatrereineclotilde.com/ Direction Emile Azzi. Le TRC s’engage pour l’environnement. La nature, le vivant sont ce qu’il y a de plus essentiel. Au 77, de la rue de grenelle 75007 Paris, au cœur d’un quartier chargé de petites et grandes histoires, à l’intérieur d’une école primaire !
Le TRC, Théâtre de la Reine Clotilde s'engage pour l’environnement ce qu'il y a de plus essentiel.
Découverte de la Ferté-Milon, le musée Jean Racine installé dans la maison où Jean Racine passa son enfance.
Un jour, une ville : La Ferté-Milon avec Les Amis de Versailles
https://www.amisdeversailles.com/inscriptions_en_ligne.php?#s_menu
Podcast
https://www.radioorient.com/podcasts/sawa-avec-avec-la-comedienne-rabia-tlili-pour-berenice-24291
Racine à l’opéra alors qu’il était « en quête du rien » ! Ne voulant pas de mise en scène sur une œuvre de concision et d’émotion. L’écriture orchestrale risque d’être très déclamatoire une plainte à trois voix demande des surtitres indispensables !
Les vers chantent… sur papier
Il ne se passe presque rien, mais comment ne pas être subjugué par le déferlement et l’atemporalité des émotions, la confusion des sentiments, l'extraordinaire beauté du verbe racinien… et la musique des vers ? Car l’alexandrin est incroyablement musical, et tout compositeur doit s’accommoder de cette partition invisible. Prenons, par exemple, « que le jour recommence et que le jour finisse / Sans que jamais Titus puisse voir Bérénice / Sans que de tout le jour je puisse voir Titus » : les vers chantent sans qu’il soit besoin d’y ajouter des notes.
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